Keurssoutoura, le village des talibés
C’est une idée qui nous trottait dans la tête depuis des mois, c’est devenu un rêve puis ce rêve s’est exaucé. C’est à deux voitures chargées à bloc d’enfants, de vêtements et de riz que nous partons en expédition rejoindre nos petits talibés qui nous manquent tant depuis qu’ils sont repartis au village.
En effet, depuis la Tabaski, début octobre, la plupart des talibés sont rentrés au village pour revoir leurs familles et travailler dans les champs. Six sont restés au daara avec le marabout. Nous les emmenons avec nous, excepté Amadou qui est forcé de rester au daara à cause de sa circoncision toute fraîche.
Le voyage se fait en musique…et en danse !
Petite pause de 3 heures en plein soleil, devant la belle mosquée de Mbour car une des deux voitures est en panne…
Heureusement que les enfants sont patients et que nous avions emportés des gâteaux pour les faire patienter.
Enfin repartons.
Arrivés vers Kaolack, nous nous rapprochons de Ndoffane. Quand Amadou et Aliou, nos deux petits compagnons de voyage, reconnaissent les lieux, c’est en se trémoussant sur leur siège et avec de grands yeux qu’ils dévorent le paysage et commentent les cases qu’ils reconnaissent. Un vrai bonheur. Arrivés à Keurssoutoura, leur village, nous nous arrêtons chez le marabout ; les talibés que nous avons ramenés à leur village disparaissent tout simplement de notre vue, trop pressés de retrouver leurs proches, tandis que les enfants du village arrivent au fur et à mesure, tous plus essoufflés les uns des autres, le souffle court d’avoir couru pour nous voir. Des têtes inconnues nous semblent familières, et c’est dans la nuit tombante que nous nous amusons à reconnaître les frères et les sœurs des enfants que nous côtoyons depuis des mois.
Nous promettons de revenir le lendemain matin, et nous repartons sur Kaolack pour passer la nuit chez le frère de Pape, qui travaille dans une usine d’extraction d’huile d’arachide (et qui habite près d’un immense tas d’arachides, pas aussi haut que le Mont Kilimandjaro, mais presque !)
Le lendemain matin, nous sommes de retour au village et les enfants sont là pour nous accueillir !
La matinée se passe sur une natte, à l’ombre d’un grand manguier, entouré des enfants qui sont de plus en plus nombreux.
Petit intermède téléphone à Bintou, la chargée de mission Adpt élémen’t’erres au Sénégal.
Je perds très vite possession de mon appareil photo, ce dernier étant pris en otage par différentes petites paires de mains.
Puis sous le soleil de 13 heures, car 13 heures, c’est notre heure, direction le reste du village à la rencontre des familles.
Bientôt, nous sommes suivies puis escortées par une troupe des enfants du village qui s’en reviennent de l’école
Puis nous rentrons à la queue leu leu chez le marabout, les mains remplies de guertés (arachides).
Quelques aperçus des moments passés en compagnie des habitants du village.
Pour le repas à l’ombre du manguier, pas moins de quatre bols, offerts par le marabout et des familles du village, s’étalent devant nous.
Pendant l’ataya et bien sûr, les éternelles guertés grignotées en compagnie des enfants, le marabout et des hommes du village s’installent sur la natte. Ca discute, ca discute puis nous partons à la découverte du travail dans les champs, Amadou le plus grand fils du mlarabout nous sert de guide. Nous rencontrons donc Salif, qui travaille dans son champ de guertés, rapidement rejoint par Pape et Moussa.
Le travail sous le soleil est éreintant, Salif et son frère sont deux pour cultiver trois champs. Le prix de vente est dérisoire, surtout quand on voit la sueur versée et le temps passé pour remplir un sac d’arachide.
La paille servira pour nourrir le cheval, malheureusement cette année, la quantité n’est pas suffisante pour tenir jusqu’à la saison prochaine.
Il reste également des arachides dans la terre et bientôt, des femmes viendront touiller la terre pour diminuer les pertes.
Rapide arrêt dans un champ de pastèque.
Après cette excursion, nous sommes de retour au village. La nuit tombe et nous nous installons dehors sur une natte pour un repas thiéré-lait. Les enfants viennent nous rejoindre. C’est la nuit, et à la lumière d’une torche, nous faisons une séance de lecture avec quelques enfants.
Puis nous nous amusons à enregistrer quelques sons avec eux, et c’est Lamine qui après un rap en langue poularde, adresse un message plutôt touchant à l’équipe Adpt, à voir dans un prochain article !
Nous donnons au marabout et à sa femme des médicaments que nous avons ramenés. Les explications furent plutôt laborieuses mais heureusement abouties.
Nous passons une nuit agréable mais fraiche dans la maison du marabout. Aux premières lueurs, après la première prière, nous repartons.
En conclusion, les enfants étaient très fiers de nous présenter à leurs familles et de nous montrer leur village. Ils nous ont ramenés des sacs de cacahuètes une fois revenus à Petit Mbao.
De notre côté, cette expérience fut également largement appréciée. C’est un voyage que nous voulions effectuer depuis des mois et nos attentes ont été plus que comblées. Nous avons été très bien accueillies par le marabout et les familles malgré le peu de moyens dont ils disposent.
Après avoir découvert la dureté du labeur que les villageois vivent quotidiennement dans les champs d’arachides, nous avons donc appris à savourer ce produit en ayant une pensée pour toute la sueur versée et le peu de bénéfices qu’ils récupèrent.